LOUIS XVIII
 
 






            (Versailles, 1755 - Paris, 1824.) Roi de France. Petit-fils de Louis XV et frère puîné de Louis XVI, Louis Stanislas Xavier de France porte d'abord le titre de comte de Provence. C'est un garçon docile, au regard clair, au visage plein, au menton lourd. Il parle peu et semble réfléchir beaucoup.

            Monsieur n'est pas exempt de défauts. Passons sur sa gourmandise, qui le condamne très tôt à l'obésité et à la goutte. Son extrême dissimulation est bien plus inquiétante. il se marie en 1771 à Louise Marie Joséphine de Savoie. Son adhésion aux «idées nouvelles» est bientôt connue. A la fin de l'année, il tente de se faire nommer lieutenant général du royaume. Mais MarieAntoinette, qui lui trouve une « marche souterraine », s'y oppose.

            L'année suivante, Monsieur est compromis dans la conspiration de Favras. Il nie toute participation dans l'affaire, et son ancien officier subit la peine capitale. Il s'enfuit de Paris le même jour que le roi (20 juin 1791), mais ne prend pas le même chemin. A l'issue d'un voyage fertile en alertes, mais sans grave incident, le voilà en sécurité à Coblence où il rejoint son frère Artois, émigré depuis deux ans.

            Chef de la maison capétienne après le roi, il se déclare lieutenant général. Ses conseils seront mal jugés, comme ceux du comte d'Artois, avec lequel il ne parvient d'ailleurs pas à s'entendre.

            A la nouvelle de l'exécution de Louis XVI, il prend le titre de régent, et proclame l'avènement de Louis XVII; la lieutenance du royaume échoit au comte d'Artois. La guerre l'a obligé à changer plusieurs fois de résidence. En 1794, fuyant devant de nouveaux périls, il se réfugie à Vérone. Son existence matérielle, comme celle de son entourage devient de plus en plus précaire. Quand la "mort" de son neveu est annoncée, en juin 1795, Louis Stanislas Xavier devient pour les royalistes Louis XVIII, pour les révolutionnaires et les gouvernements étrangers « le Prétendant ».

            Vérone est déjà le siège d'une cour. Un ministère s'y forme. Mais en 1796, Venise prononce l'expulsion des gêneurs qui s'installent à Blankenburg (pendant le chemin, le «Prétendant» échappe par miracle à un attentat). Deux ans après, les Français, de nouveau indésirables, trouvent un asile sûr à Mitau, en Courlande, chez le tsar. Il faut de nouveau déménager. A Varsovie, le roi de France reçoit de Bonaparte le conseil qu'une sage démission mettrait fin à ses maux. Bien sûr, il refuse avec indignation. Peu après, il échappe à une tentative d'empoisonnement. Sur ces entrefaites, Alexandre ler a succédé à Paul l er et permet le retour à Mitau.

            En juillet 1807, le tsar signe la paix avec Napoléon. L'Angleterre est le dernier asile possible pour Louis XVIII qui s'établit non loin de Londres, à Gosfield et enfin à Hartwell. Pendant de longues années, jusqu'aux premières grandes défaites de l'Empire, il faudra continuer à vivre d'expédients ou d'aumônes.

            La veille de Pâques 1814, Blacas annonce la déchéance de l'Usurpateur à son micitre. Celui-ci, qui n'a jamais rien abdiqué de sa majesté dans le malheur, accueille l'heureuse nouvelle sans rien manifester. Après avoir traversé Londres pavoisée, le roi de France s'embarque pour Calais. Ainsi commence la Restauration, dont les premiers actes sont la déclaration royale de Saint-Ouen (2 mai) et l'octroi de la charte (4 juin). Il parviendra à éviter la guerre civile.
 

            Le retour de Napoléon de l'île d'Elbe (1815) contraint le roi à quitter Paris et amène les Cent-Jours pendant lesquels Louis XVIII vit à Gand. A la Seconde Restauration, Blacas sera sacrifié comme bouc émissaire des fautes supposées ou exagérées de la première; cette fois, Louis XVIII est visiblement rétabli sur le trône par l'étranger et doit accepter les dures conditions du second traité de Paris (novembre 1815) et même la présence de Fouché au gouvernement.

            Le roi s'efforce de limiter une épuration inévitable. Lorsqu'il apprend la capture de Ney, il maudit le zèle de ceux qui l'ont arrêté, l'obligeant ainsi à sévir. Bientôt la Chambre est tantôt trop royaliste à son goût, tantôt penchant pour le libéralisme ou mal équilibrée pour une politique suivie. Louis XVIII, à son retour de Gand, a 60 ans; à sa mort, près de 70. Son embonpoint le rend impotent, condamné à une immobilisation progressive, il se prépare à devenir le « Roi-Fauteuil ». Le roi aura la bonne idée de reprendre Richelieu, homme d'une indépendance absolue. Les affaires de l'État seront de nouveau aux mains des spécialistes, ce qui contentera une partie de l'opinion. En déliquescence, il souffre le martyre, notera Marmont, avec un courage, une résignation, un calme extraordinaires.

            Ses sujets ne le pleureront guère. Celui qui avait restauré, non seulement sa dynastie, mais une France forte, sera victime de l'ingratitude des peuples et de la passion sectaire de beaucoup d'historiens.
 



Extrait de : "Dictionnaire illustré de l'Histoire de France" par Alain Decaux et André Castelot, publié aux Éditions Perrin, 1989.