LOUIS XV LE BIEN-AIMÉ
 
 




            (Versailles, 1710-1774.) Roi de France et de Navarre (1715-1774). Tout, apparemment, semble être réuni pour seconder ce jeune monarque, monté sur le trône en 1715, son oncle le Régent dirigeant les affaires jusqu'en 1723. Orphelin de père et de mère, privé de frère, l'enfant royal trouve un peu de chaleur maternelle auprès de Madame de Ventadour, sa gouvernante. Le jeune souverain a la chance de recevoir pour précepteur un homme de qualité, le cardinal Fleury. Majeur à 13 ans, marié à 15 ans, père à 17 ans, Louis est bien accueilli par la nation.

            La bannière à fleurs de lys flotte de l'embouchure du Saint-Laurent jusqu'aux abords des Grands Lacs et en Louisiane. Il en est de même aux Antilles et aux Indes, au Sénégal comme dans l'océan Indien. Marie Leczinska, fille d'un roi de Pologne détrôné qui n'a plus de souverain que le nom, est choisie comme épouse. De six ans l'aînée du monarque, Marie se voit élevée à ce rang flatteur dans le seul dessein de barrer la route d'une succession possible à la famille d'Orléans.

            Troisième fils de Louis, duc de Bourgogne, et de Marie-Adélaïde de Savoie, Louis n'était pas appelé à régner. La mort de son père et de ses frères aînés lui assure le chemin du trône. Il lui manque néanmoins l'éducation que Fénélon a réservée à son père. Sous un aspect élégant, racé, Louis XV montre un caractère instable. A cela s'ajoute de l'indolence, des crises de neurasthénie qui iront s'amplifiant avec l'âge et une méfiance qui favorisera les intrigues dans l'entourage royal. A la chasse, il épuise bêtes et gens et doit cette résistance à son penchant pour la vie au grand air et une agilité qui lui permet, assure-t-on, de se promener sur les toits de Versailles.

            En vérité, Louis XV est un personnage plein de contradictions. «Voyant plus juste que les autres, écrira le duc de Croÿ, il croyait toujours avoir tort. » Il n'exerce ses responsabilités que très tard, c'est-à-dire à partir de la mort de Fleury. Il est alors âgé de 33 ans. Ce personnage tout-puissant est l'homme le plus timide du royaume. Il redoute les interlocuteurs qu'il ne connaît pas. Il n'aime pas parler en public et se montre toujours si tendu, si anxieux, qu'il passe à tort pour indifférent, voire stupide.

            Son cabinet de Versailles est un entassement de rapports qu'il examine minutieusement. La guerre de Succession de Pologne (1733-1738), dont la négociation est menée à Vienne, prévoit la remise du duché de Lorraine à Stanislas Leczinski en compensation de la perte définitive de son royaume d'orîgine; la province devant revenir à la couronne de France à la mort du beau père du roi.

            Le terme d'un deuxième conflit, celui de la Succession d'Autriche, voit la France conclure une efficace alliance avec la Prusse. C'est l'occasion pour la monarchie de remporter sur le champ de bataille des succès, en Belgique, à Fontenoy puis, à Raucoux, enfin à Lawfeld. Mais à la paix d'Aixla-Chapelle, en 1748, la diplomatie royale laisse échapper l'occasion d'acquérir la Savoie et Nice.

            La guerre de Sept Ans voit disparaitre la Nouvelle-France en Amérique du Nord et un embryon d'empire des Indes, dont il ne subsiste, finalement, en 1763, que cinq comptoirs. Fatigué par les plaisirs, le roi n'a plus la prestance d'antan. Abattu et languissant, le monarque néglige de plus en plus les affaires, l'acquisition de la Corse, en 1768, représentant toutefois une des rares mesures judicieuses de la fin d'un règne.

            Les caisses de l'État sont vides et les abus des fermiers généraux entrainent, expliquent et justifient les réactions de Mandrin et des siens, qui luttent contre des tenanciers de la Ferme, prévaricateurs et corrompus, aux privilèges exorbitants.
Il est certain que le souverain redoute l'avenir pour son successeur, son petit-fils Louis duc de Berry, le dauphin étant mort en 1765 et Marie Leczinska ayant donné huit filles à la dynastie.

            Miné par la petite vérole, le roi s'éteint le 10 mai 1774.
 



Extrait de : "Dictionnaire illustré de l'Histoire de France" par Alain Decaux et André Castelot, publié aux Éditions Perrin, 1989.